27 May Le coût des risques psychosociaux pour les entreprises
Nous avons tous entendu parler de « boule au ventre », de fatigue chronique, de douleurs au dos, de maux de tête, de palpitations, de nervosité, de renfermement, etc. Lorsque ces maux deviennent récurrents ou lorsqu’ils s’amplifient, ils sont susceptibles de se muer en troubles musculeux squelettiques, en dépression, en maladies cardiovasculaires, en épuisement…. Non maîtrisés, ces troubles dits « psychosociaux » (stress, violences verbales…) ont des effets néfastes sur la santé psychique et physique des collaborateurs. Ils génèrent des coûts directs pour l’entreprise — sous forme d’arrêt de travail ou de cotisation sociale, pour les plus évidents — mais aussi des coûts indirects.
Évaluation de coûts directs
- coût social du stress : 830 millions d’euros en dépense de soins, absentéisme et décès prématurés (TMS, maladies cardiovasculaires, dépression) Source : INRS
- dont 736 millions d’euros de frais couverts par les cotisations entreprises (Source : CNAMTS)
- 50 à 60% des journées de travail perdues à cause du stress (Source INRS)
- coût de l’absentéisme : 3 500€ par salariés / an : chaque salarié absent coûte en moyenne, par an, 3 500€ à l’entreprise. Cette dépense varie selon le profil du salarié. Ainsi, on l’estime à environ trois fois le taux horaire du salarié concerné (ANACT).
- et pour le cas le plus dramatique, un suicide, les entreprises qui ont une part de responsabilité déboursent entre 380 000 et 500 000 euros (Source : Novethic 2009)
Des coûts indirects …
A ces coûts directs s’ajoutent les « coûts cachés », ou encore « coût performance caché » (Henri Savall) : dus à des problèmes organisationnels et humains, ils traduisent les dysfonctionnements des activités de l’entreprise d’un point de vue financier. On parle de « coûts cachés » parce que ces dysfonctionnements peuvent perturber des secteurs clés de l’entreprise : la gestion, les conditions et l’organisation du travail, la qualité, la productivité, la coordination, la mise en œuvre de la stratégie, la communication et l’image de l’entreprise mais aussi le climat social, l’implication des collaborateurs, la capacité d’adaptation de l’entreprise, son agilité face aux marchés… Concrètement, combien de collaborateurs garderont pour eux astuces et bonnes idées s’ils ne ressentent plus d’écoute ni de considération ? Combien finiront par lever le pied s’ils ont le sentiment que leur investissement n’est pas reconnu ?
Cette attitude conduit au phénomène de présentéisme, une présence inactive au poste de travail. Selon l’INRS le coût du présentéisme serait 4 fois plus élevé que celui de l’absentéisme ! Si on prend le turn-over en exemple, celui-ci entraîne une perte de savoir-faire (compétences / expériences), gonfle les budgets Intégration et Formation, ralentit l’entreprise, perturbe les équipes, voire les clients… L’addition est vite salée ! Et les risques psychosociaux sont reconnus comme une cause majeure de coûts cachés.
… A la performance empêchée
Une situation qui se dégrade peut mener à la mise en péril d’une structure. C’est pourquoi l’INRS intègre les cessations d’activité dans son estimation de 2 à 3 milliards d’euros du coût social du stress. En effet, les entreprises particulièrement en souffrance ont souvent une production désorganisée, fonctionnant en « mode pompier », courant après le résultat du mois au détriment du reste, perturbant la production, rognant sur la qualité, rendant des clients mécontents, n’ayant plus de temps pour la réflexion et l’innovation… Ces entreprises entrent dans un cercle vicieux où mal-être et dysfonctionnements se nourrissent mutuellement. Il faut alors compter sur de puissants leviers compensateurs pour tenir et se relever, telle que la fierté d’appartenance.
Conclusion
L’entreprise doit être capable de proposer un cercle vertueux conjuguant bien-être au travail et performance. Il se construit à travers un projet d’entreprise partagé qui trouve son sens dans la raison d’être de l’entreprise au service du progrès économique, social, environnemental ou sociétal. Le volet social et la qualité managériale du projet sont essentiels pour deux raisons. Tout d’abord, ils donnent du crédit aux valeurs de l’entreprise, à sa posture responsable. Mais aussi, il s’agit de conditions nécessaires à l’engagement des collaborateurs, sans lesquels l’entreprise perd en agilité et en efficacité, ce qui se ressent immanquablement sur le long terme : « entre 1998 et 2005, les entreprises les plus socialement avancées ont réalisé une performance annualisée de 14%, soit le double de la performance du marché » (Etude de la Wharton School et University of Pennsylvania, 2009). Si les coûts directs et indirects des RPS se calculent, il en va de même de la progression du bien-être au travail. A suivre.
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